The King of Thieves and the King of Rats [Juin 902]

The King of Thieves and the King of Rats

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Le Palais Impérial se dresse fièrement et majestueusement devant mes yeux. Lui, et ses nombreuses colonnes pierres blanches, ses portes de chênes ouvragés, son perron de marbre, ses multiples statues de granit et fontaines d'argents. Lui, qui respire le luxe et le pouvoir, et qui défie toute la cité, tout l'empire romain de le défier. Jamais, je n'avais encore eu le cran de tenter d'y pénétrer pour tenter de voler l'empereur en personne. C'en était même hors-de-question, je tenais bien trop à la vie pour tenter une entreprise aussi invraisemblable et emprunt de folie. Je n'avais aucune envie d'avoir ma tête au bout d'une pique ou d'être balancer dans l'arène en pâture pour les lions du cirque. Rien que d'y penser, cela me donne des frissons. Jusqu'à présent j'avais eu beaucoup de chance de ne pas y avoir été envoyé et je ne comptais pas forcer cette bonne étoile. Je comptais bien vivre le plus longtemps possible.

Cependant, je n'ose peut-être pas m'introduire dans la demeure de l'Empereur, ce n'est pas la même histoire en ce qui concerne ses sénateurs. Je n'avais aucun remords à venir les délester de quelques bijoux et autres pierres précieuses dont ils ne se soucient que trop peu. Selon moi, ces petites merveilles sont bien mieux en ma possession qu'en la leur. La plupart du temps, je dépense mes prises en nourriture et en vêtements, parfois, lorsqu'il m'en reste suffisamment, je verse un bon gros pourboire à gérant de bain pour qu'il m'offre une place dans son établissement. Vraiment, on ne peut pas aimer les bains romains tant qu'on a pas essayer ! De plus, cela m'aider à rentrer dans mon personnage lorsque j'allais faire la cour à une ou deux belles filles de consuls ou autres puissants de Rome.

Un sourire aux lèvres, je relève mon capuchon sur ma tignasse pour dissimuler au mieux mon visage avant de sortir de mon point d'observation sur le piédestal d'une girouette à vent. Je me laisse glisser sur le toit de tuiles rouges de la demeure la plus proche avant de me mettre à évoluer de toit en toit avec légèreté. Cette sensation de liberté que je ressens à chaque fois me grise autant qu'à chaque montée d'adrénaline avant un passage à l'acte. J'arrête ma course au bord d'un toit avant de sauter entre deux propriétés, sur un balcon reliant les deux maisons. Dans l'ombre, je crochète habilement la serrure d'une des portes en moins de temps qu'il ne faut pour réciter le serment des légions romaines. Une fois à l'intérieur, je laisse entrouverte la porte par laquelle je suis entrer avant de me diriger directement vers l'étage d'en dessous. Comment savais-je où aller ? C'est très simple, l'architecte qui a conçu ce domus est le même qui à conçu la moitié du quartier riche de Rome. M'agenouillant près d'un coffre, je serre le cadenas dans ma main en puisant au fond de moi pour déclencher un afflux de magie. Le mécanisme du cadenas gèle entre mes doigts, le fragilisant à un seuil critique. D'un mouvement sec du poignet, j'arrache la coquille de fer gelée de la serrure puis ouvre le fameux coffre. Ce dernier me dévoile un tas de parchemins officieux ainsi qu'une petite bourse de cuir. Ne me souciant pas des documents, j'empoigne la bourse et la four dans ma besace.

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Cette journée ressemblait à tant d'autres. Au fond de sa chambrette, assis devant la petite table à sa disposition, Ulter avait passé plusieurs heures à établir les colonnes de comptes et autres listes administratives qu'on exigeait de lui. La chose était devenue une routine pour son esprit très rapide à calculer, et sa main tout aussi preste à tracer les chiffres au creux des tablettes de cire. Routine qui, au moins, l'occupait et présentait l'étrange vertu de divertir un temps ses pensées des inquiétudes à lui agiter souvent le crâne. Ses peines et ses craintes pour Freya, d'abord. L'amour qui naissait entre la jeune patricienne et lui... ne serait toujours réduit qu'à la clandestinité s'il ne voulait pas jeter la demoiselle dans le déshonneur et, lui, finir cloué à une croix. Juste après venaient, si souvent, de permanentes interrogations quant à sa chère Yggradsil dont il se trouvait si loin... Comment se portaient sa famille et ses amis ? Azura, qui devait se débarrasser d'un abject fiancé ; Ñolofinwë qu'il souhaiterait retrouver plus sûre d'elle et de ses pouvoirs qu'il ne l'avait vue la dernière fois ; Ulrik et les affaires politiques du village – affaires que sa satanée capture venait encore corser.
Pour échapper un temps à l'angoisse, Ulter n'avait pas rechigné à l'idée de s'occuper trois heures par jour aux travaux administratifs exigés par le contremaître du consul Tiberius. Ce contremaître était un con. Un primaire inculte. Qui aimait à le prendre de haut. À dire que tant qu'à être détenu en cette villa – et dans des conditions plus qu'enviables pour un otage qui avait désobéi à Rome en cachant une pourchassée – il fallait qu'il y occupe une fonction. Soit. Ulter prenait cela avec détachement lors de ses meilleurs jours, et durant les autres avec mépris en prime. Au moins, le consul Tiberius, lui, se montrait raffiné et respectueux – ouvert, même, à parler régulièrement d'égal à égal avec l'étranger... ou à ce qu'il se promène à sa guise en certaines pièces de sa domus pour profiter du jardin, et des livres dont tous deux avaient la passion. Ulter néanmoins n'était pas dupe : le laisser accéder à la littérature de l'Empire, c'était une manière de propagande douce. À ce jeu toutefois, Rome ne gagnera pas et le jeune homme resterait de tout cœur à Yggradsil. Ceci étant assuré, pouvoir mémoriser des centaines de beaux textes : l'érudit ne crachait pas dessus.

Ayant à l'instant fini de s'acquitter de son ouvrage, il déposa les tablettes sur un coin de table où elles attendraient comme à l'accoutumée que quelqu'un vinsse les relever. L'otage empoigna ses béquilles abandonnées contre le mur. Il se dirigea vers la bibliothèque où il cueillerait un nouveau recueil avec lequel passer du temps dans le jardin. Mais au beau milieu de sa route, de curieux bruits en provenance d'un des bureaux de la villa attirèrent son ouïe. On avait brisé quelque chose. Sans doute un des cadenas dont Ulter savait les coffres de cette pièce clos. Puis un grincement. Ça fouinait. Tous les esclaves de la domus étant actuellement occupés les uns en cuisines, les autres à laver de fond en combles les arrière-cours, ce ne pouvait être que ce à quoi il pensait !
Par les Dieux, les gardes autour du domaine n'avaient-ils rien vu ? Rien entendu ? Le larron avait dû passer par les hauteurs, profiter de quelque dévers, puis d'un balcon ou d'un décroché le long d'un mur. Ulter fronça les sourcils. Immédiatement, il se pencha pour attraper les manches les plus bas de ses cannes et ainsi se mettre à genoux sans un bruit. Tout aussi discrètement, mais sans perdre de temps, il posa les béquilles sur le côté puis se plaqua au sol. Il allait avancer en rampant, à la force des bras, jusqu'au bureau indûment occupé : ainsi ne préviendrait-il pas trop tôt le voleur de son approche par le claquement sonore de ses engins. Il fut preste à se déplacer, habitué à cette position, et en quelques secondes seulement l'infirme se retrouva dans la pièce concernée – après en avoir poussé d'un coup la porte. Ulter y découvrit une silhouette encapuchonnée, qui venait de fourrer une bourse gorgée de sesterces bien sonnants au fond de sa besace.

« Hé là, toi. » interpella-t-il, sec, mais pas trop fort encore : attirer les esclaves et les soldats – aussi bien extérieurs que les quelques-uns qui rôdaient à l'intérieur du domaine – ce serait assurément condamner ce voleur à une prompte arrestation, puis aux arènes. Ulter ne se sentit pas ce cœur-là. Il ne voulait pas non plus passer pour un bon chien de garde aux yeux des Romains, ni pour un lèche-bottes prêt à appeler les gens d'armes afin de protéger la domus. L'idéal serait de simplement mettre le brigand en fuite avec la seule bourse qu'il avait déjà saisie, mais sans qu'il fît davantage de dégâts et se mît en tête de dérober des papiers d'importance, des textes politiques ou que savait-il encore. Là, ce serait bien plus embêtant et ceux de la villa qui se montraient les plus malveillants avec l'otage seraient encore capables de le suspecter de quelque conspiration.

Ulter n'espérait pas devoir en venir à gueuler pour attirer soldats et esclaves. Cependant, si le voleur avait dans la seconde le moindre geste agressif, il n'hésiterait pas. Lui-même ne disposait de rien pour se défendre. À Yggradsil, même invalide, il arrivait à se battre ou à prendre par surprise, quand il disposait de dagues ou d'une hache. Mais en l'occurrence... Pourvu que ce type ne lui fasse rien. L'otage le fixa, de ses grands yeux très bleus, polaires. Il était immobile, toujours à plat-ventre, le haut du corps relevé par ses bras tendus, poings comprimés au sol. Mâchoire serrée, d'un brusque haussement de menton il invita cordialement le malfrat à ne pas traîner un instant de plus ici.
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Étonnement, je n'avais rencontré aucune résistance pour m'infiltrer dans la propriété de ce consul. Certes, j'avais pris tout mon temps pour repérer les moments de la journée où la maison est la moins grouillante de vie mais jamais je n'aurais pensé ne rencontrer aucune difficulté. Les gardes avaient du soucis à se faire et de gros efforts à fournir dans l'avenir s'ils ne veulent pas finir au cirque. Personnellement, je ne serais pas rassurer d'avoir des gardes aussi incompétents. Peut-être que le consul qui habite ici ne les paies pas assez chers mais dans tous les cas, il ne pourra pas leur fournir une augmentation de salaire immédiate. Le sourire aux lèvres, je glisse la bourse de cuir dans ma besace qui s'affaisse légèrement et se tend un peu plus sous le poids des sesterces qui viennent d'entrer en ma possession.

Malheureusement pour moi, mon sourire s'efface rapidement lorsque j'entends le grincement caractéristique d'une porte qui s'ouvre derrière moi. Je reste campé sur mes positions, ne bougeant pas d'un pouce, écoutant attentivement, à l'aguet de tout autres sons. Une voix ne tarde pas à se faire entendre derrière moi, me maudissant intérieurement je pivote sur mes talons pour faire face à mon interpellateur. Par tous les dieux, pourquoi n'ai-je pas fait plus attention que ça ? Je me doutais bien que cette fois-ci cela avait été beaucoup trop facile. Cependant, j'étais loin de me douter de ce que j'allais découvrir. La capuche toujours bien enfoncée sur ma caboche, je me redresse et fais face au g...

Mes yeux se posent sur un homme, d'à peu près de de mon âge si je ne m'abuse, à moitié allongé sur le ventre contre les dalles de carrelage qui composent le sol de la pièce. Ce dernier me fixe de ses yeux en me désignant la sortie d'un bref signe du menton. Je le dévisage quelques instants. Qu'on ne vienne pas me dire que c'est lui le garde de la demeure sinon je risque d'éclater de rire. Je ne pense pas non plus que cela soit un esclave, qui voudrait d'un esclave se traînant au sol ? Un coup d'oeil à ses vêtement suffit pour me dire qu'il ne fait pas partie de la famille du consul, les textiles qui composent sa tenue ne sont pas assez précieux pour ça. Hum. Qu'avons-nous là ? Ma curiosité est piquée au vif.

"Et si je ne veux pas partir ? Les gardes ne bougeront pas si tu les appelles, les esclaves auront bien trop peur d'approcher une telle pièce sous peine d'être puni. Je ne veux pas paraître grossier mais tu n'es pas en capacité de me faire sortir d'ici par la force."

Mes lèvres se plient en un léger sourire tandis que je referme le coffre avant de prendre place dessus en regardant l'homme face à moi.

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L'entrée pour le moins singulière d'Ulter attira aussitôt l'attention du brigand. Il put deviner la perte immédiate de son expression détendue, du peu que lui laissait voir la capuche rabattue sur la tête de l'individu. Mais au lieu d'une réaction brutale de sa part – car l'otage avait conscience qu'il aurait pu prendre la fuite ou essayer de s'attaquer à lui – le voleur resta un court instant comme en suspend, vissé sur place par la découverte de l'estropié rampant qui venait de faire irruption. Pour le coup, Ulter s'en amusa et accueillit cette réaction d'un haussement de sourcil malicieux où se devinait un fond d'auto-dérision : son corps désossé, lorsqu'il se déplaçait ainsi à même le sol, avait au moins l'avantage de surprendre – même de décontenancer – quiconque se trouvait en face et s'attendait rarement à telle apparition. Alors oui, parfois cela pouvait devenir presque amusant. Combien de fois lui était-il arrivé, enfant, de surprendre autrui par le bas – car par derrière, c'était surfait.
Le sérieux revint cependant bien vite à Ulter tandis que, une fois la surprise passée, l'intrus analysait la situation autant que sa personne. Grâce aux Dieux, il ne semblait pas décidé à l'agressivité : il n'y aura pas à tenter de se défendre ni à crier. L'air circonspect du larron laissa plutôt deviner à l'infirme ce qu'il se demandait sans doute en cet instant. Encore un qui devait se questionner quant à la nature de cette étrangeté – Ulter avait l'habitude : trop modestement vêtu pour être de cette famille, pas assez couleur locale pour être même Romain, mais d'une trop curieuse attitude pour être un esclave. Oh, il était déjà arrivé malgré tout qu'on le prenne pour un de ces pauvres « instruments vivants » – comme les nommait le grand Aristote. Qu'on se l'imagine affecté, comme esclave, à des corvées qui pouvaient s'effectuer en restant assis et ne réclamaient que les bras. Alors, le franc-parler d'Ulter démentait vite la chose... quand il ne répondait pas avec malice que c'était faire insulte à la fortune du Consul que de se l'imaginer devoir se rabattre sur l'achat d'un esclave de deuxième – voire troisième qualité.
Encore une fois, Ulter trouva presque amusant de voir le brigand occupé par sa curiosité davantage que par toute autre chose plus urgente. Au moins, c'était plutôt bon signe : quelque chose lui disait que l'individu n'était pas un violent et cherchait surtout à détrousser les villas. L'otage de son côté dut s'avouer interloqué par un détail qui lui apparut, alors qu'il avait profité de ce temps de suspend pour analyser les environs et tous les tenants de la situation : le cadenas qui verrouillait le coffre... Il était ouvert, brisé, mais loin d'être complètement détraqué alors qu'un tel outillage aurait dû être rudement forcé. Comment le voleur en était-il venu à bout si aisément ? Les grands yeux bleus d'Ulter fixèrent le cadenas. Une grimace interrogatrice tordit un coin de sa lèvre.

À son étonnement, le brigand restait là et répliquait. Il prétendait vraiment que ni gardes ni esclaves ne se déplaceraient si un membre de la domus – aussi otage fût ce membre – criait au secours et signalait une intrusion ?! « Tu es ma foi bien sûr de ce que tu avances. » rétorqua Ulter, incrédule. S'il s'aventurait à prendre d'autres choses, il faudrait tester ses dires. En causant, l'otage songea une nouvelle fois, consterné, aux vigiles qui n'avaient donc rien vu ni entendu ! Ceux-là allaient avoir de sérieux ennuis au retour du Consul. Repas bien trop alcoolisé, manque d'attention à leur poste ou victimes d'une ruse habilement huilée ? Il n'en restait pas moins que les gardes de service sur cette tranche de la journée venaient de manquer à leurs devoirs – pour que le malfrat soit rentré si aisément. Il allait y avoir des réprimandes, des retenues sur salaire, peut-être même des coups.
Ulter s'autorisa un petit rire bon joueur à la dernière pique adressée par le larron. Un point pour lui. En tout cas, dans ces circonstances où le jeune infirme était désarmé. Il était en revanche brillant au lancer de hachettes et ses bras robustes savaient maîtriser, voire étouffer un homme. En chasser un toutefois, ce serait une autre paire de manches. « Sans doute. » reconnut-il donc. « En attendant, il semble par contre que je sois aujourd'hui le garde le plus efficace de cette domus. » ajouta-t-il dans un rictus en suivant sa brève humeur à plaisanter – sans doute l'effet immédiat du soulagement à ne pas s'être trouvé en présence d'un assassin qui lui aurait sauté à la gorge. « On ne regarde jamais assez ce qui se passe à nos pieds. » Ce que certains nobles devraient aussi méditer s'ils ne voulaient pas sous peu essuyer un soulèvement de ceux que leurs pieds pressaient.
Le brigand prit ses aises sur le coffre dont il avait, par Loki savait quel miracle, fait céder le cadenas sans grands moyens. Allons bon ! « Ne te trouves-tu pas suffisamment servi ? » grogna Ulter, avant de se dépatouiller pour changer de posture : passage complètement à plat-ventre ; puis sur le dos ; se redresse ; une jambe traînée, puis l'autre... et le voilà plus décemment installé, assis face à l'intrus.
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L'infirme semble apprécier la tournure presque philosophique des mes propos. Et c'est d'un hochement de tête que je lui confirme la véracité de ses dires. En effet, ma profession comme il l'appelle si bien, m'a permise de vérifier plus d'une fois la prétendue supériorité des puissants. Un sourire amusé vient étirer de nouveau mes lèvres, alors comme cela l'homme semblait intéresser par mon expérience. Intéressant. Très intéressant et cela éveille encore plus la curiosité que je nourris à son égard. Quel genre d'homme pouvait porter intérêt à un cambrioleur de mon acabit ? Je me le demande. Cependant, je me contente de lui fournir une réponse vague sans donnée réelle en haussant légèrement les épaules.

"Suffisamment pour constater que les puissants, si on peut les appeler ainsi, se ressemblent tous et qu'ils sont peu nombreux à considérer les gens comme toi et moi comme leurs égaux. Et malheureusement, cela n'est pas près de changer. Et ce, même si Jupiter en personne descendait de son précieux trône d'or pour leur ordonner de nous respecter."

M'installant plus confortablement sur le coffre de bois que je venais de fracturer, je le rassure quant à mes intentions. Je n'avais aucun intérêt à dérober autres choses que ce sac d'or remplit de sesterces sonnants et trébuchants. Je fini par lui poser une des questions qui me taraudes et sa réponse m'amuse autant qu'elle m'intrigue encore plus. En réalité il semble n'en avoir que faire que je dépouille plus encore ce cher consul pleins aux as et dormant sur des paillasses d'argent. Cependant, ma curiosité est plus poussée. Il semble être cultivé et réfléchit.

Sa révélation me laisse sans voix. Je ne sais pas par quoi je suis le plus surpris. Sa situation d'otage ou qu'il vienne d'Yggradsil ? Les romains ont donc décidés de faire de lui un otage pour faire pression sur le légendaire village des sorcières. Par tous les dieux, ils sont couillus pour une fois ! Si Yggradsil cela déclenchera une guerre et Rome s'empressera d'envoyer ses légions d'élites pour massacrer ce peuple marginal dans le seul but d'anéantir les sorcières et sorciers qui y vivent. Je n'aimerais pas être à la place du chef du village, être prit entre deux feux comme ça... Malgré moi, mes pensées dérivent vers Azura. Cela fait tellement longtemps, j'espère qu'elle va bien et qu'elle est heureuse. Elle me manque plus que je ne voudrais me l'admettre. Reprenant mes esprits, je réagis aux explications de l'infirme.

"Disons que j'en ai entendu parler. Tu es donc en fâcheuse posture même si d'après ce que j'ai pu observer tu aurais pu avoir une situation encore plus indélicate."

Je ne peux retenir un rictus suivit d'une léger amusé face à l'otage. Lui aussi semblait entretenir une certaine curiosité à mon égard. Je jette un coup d’œil au cadenas brisé à mes pieds. Pesant le pour et le contre, j'observe l'homme face à moi. Il dit venir d'Yggradsil et je suis assez doué pour déceler les mensonges. Le regardant de sous mon capuchon, je lève une main en puisant au fond de mon être l'afflux de magie dont j'ai besoin. Je suis suffisamment entrainer et aguerris pour utiliser mes pouvoirs sans réelles difficultés. Ma main se recouvre d'une légère couche blanche avant d'être recouverte entièrement de givre et de glace d'où se dégage une vapeur aussi froide que celle d'un iceberg.

"Cela satisfait-il ta curiosité ?"

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La situation atypique finit par amuser aussi le brigand, qui ne s'attendait sans doute pas à ce que les événements prennent cette tournure. Ulter lui-même se surprenait à se trouver là, tranquillement assis en face de l'intrus qu'il aurait dû signaler. Mais après tout il n'avait pas à se faire le bon chien de garde de la famille Genitius et il fallait croire qu'il n'était en ce jour pas d'humeur très sérieuse.

« Voilà qui est plutôt bien dit. » réagit l'infirme après les paroles qui pourraient presque venir d'un texte philosophique – et que d'aucuns auraient jugé étonnantes dans la bouche d'un cambrioleur. En voilà un qui causait habilement et avait connaissance de sages paroles. C'était à se demander à quoi avait pu ressembler son passé, quelles personnes y furent fréquentées, et si le délestage des riches demeures avait toujours constitué le quotidien de l'individu. « Je suppose que ta... profession... doit te donner beaucoup de matière à analyser sur cette question-là. Combien d'années d'expertise à ton actif ? » Était-il réellement en train de commencer à converser avec ce voleur ? ...Il fallait croire que sa situation d'otage laissait quelques traces et le faisait parfois décompresser d'une bizarre manière.

D'autres bricoles ? L'expression tira un rictus amusé à Ulter. Ni le Consul ni son épouse n'apprécieraient de voir ainsi qualifiés les nombreux objets d'art décorant leur domus. Autant de possessions contingentes, purement esthétiques, qui ne pouvaient que générer de telles pensées chez ceux dont le quotidien se résumait à une urgence de vivre – ceux qui jaugeaient surtout la valeur des choses en fonction de leur nécessité directe. Quoi qu'il en fut, l'infirme ne se souciait même pas desdites bricoles. « Oh, ce sera leur problème. Le Consul apprendra à mieux gérer sa soldatesque et tirera de ton passage les leçons pour une meilleure surveillance de son domaine. À quelque enseignement, malheur est bon. »
Là-dessus, Ulter retrouva un peu plus de sérieux lorsque l'encapuchonné lui posa la question fort légitime de l'intérêt qu'il prenait aux biens des Genitius : « Quant à moi, je sers d'otage politique. » Une pointe de cynisme lui vint et, ouvrant les bras : « Tu as devant toi l'un des pions du divin Empereur dans les... relations – si je puis dire – entre Rome et Yggradsil. J'ignore d'où tu viens, à part de la fenêtre, mais peut-être as-tu déjà entendu parler de ce village ? » Un temps. « Et donc pour te répondre, il y a dans cette villa des gens qui estiment que je suis plus un danger qu'autre chose. Autant dire que la disparition d'argent ou de documents politiques du Consul les ferait tout de suite fantasmer quant au coupable. Et à d'éventuels complices vus en secret. » C'était donc mieux – et pour lui, et même pour ce brigand s'il n'aspirait pas à être impliqué, malgré lui, dans des affaires diplomatiques qui lui attireraient bien plus d'ennuis qu'un simple larcin alimentaire – de ne pas être trop gourmand. L'otage aura fourni ces explications sur un ton détaché et avec un sourire en coin, déguisant son mépris et son agacement envers la poignée de membres de la maisonnée les plus hostiles à son endroit. Au moins n'était-ce pas le cas de Tiberius ni de sa femme Cornelia.

« Accepteras-tu à ton tour de satisfaire ma curiosité ? » demanda-t-il avant de pointer le cadenas ouvert, qui pendait encore piteusement, mais à peine fracassé. « Le Consul dispose de plutôt bon matériel. Comment as-tu fait cela, sans outil, sans bruits ni bris en excès ? »
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L'infirme semble apprécier la tournure presque philosophique des mes propos. Et c'est d'un hochement de tête que je lui confirme la véracité de ses dires. En effet, ma profession comme il l'appelle si bien, m'a permise de vérifier plus d'une fois la prétendue supériorité des puissants. Un sourire amusé vient étirer de nouveau mes lèvres, alors comme cela l'homme semblait intéresser par mon expérience. Intéressant. Très intéressant et cela éveille encore plus la curiosité que je nourris à son égard. Quel genre d'homme pouvait porter intérêt à un cambrioleur de mon acabit ? Je me le demande. Cependant, je me contente de lui fournir une réponse vague sans donnée réelle en haussant légèrement les épaules.

"Suffisamment pour constater que les puissants, si on peut les appeler ainsi, se ressemblent tous et qu'ils sont peu nombreux à considérer les gens comme toi et moi comme leurs égaux. Et malheureusement, cela n'est pas près de changer. Et ce, même si Jupiter en personne descendait de son précieux trône d'or pour leur ordonner de nous respecter."

M'installant plus confortablement sur le coffre de bois que je venais de fracturer, je le rassure quant à mes intentions. Je n'avais aucun intérêt à dérober autres choses que ce sac d'or remplit de sesterces sonnants et trébuchants. Je fini par lui poser une des questions qui me taraudes et sa réponse m'amuse autant qu'elle m'intrigue encore plus. En réalité il semble n'en avoir que faire que je dépouille plus encore ce cher consul pleins aux as et dormant sur des paillasses d'argent. Cependant, ma curiosité est plus poussée. Il semble être cultivé et réfléchit.

Sa révélation me laisse sans voix. Je ne sais pas par quoi je suis le plus surpris. Sa situation d'otage ou qu'il vienne d'Yggradsil ? Les romains ont donc décidés de faire de lui un otage pour faire pression sur le légendaire village des sorcières. Par tous les dieux, ils sont couillus pour une fois ! Si Yggradsil dérape cela déclenchera une guerre et Rome s'empressera d'envoyer ses légions d'élites pour massacrer ce peuple marginal dans le seul but d'anéantir les sorcières et sorciers qui y vivent. Je n'aimerais pas être à la place du chef du village, être prit entre deux feux comme ça... Malgré moi, mes pensées dérivent vers Azura. Cela fait tellement longtemps, j'espère qu'elle va bien et qu'elle est heureuse. Elle me manque plus que je ne voudrais me l'admettre. Reprenant mes esprits, je réagis aux explications de l'infirme.

"Disons que j'en ai entendu parler. Tu es donc en fâcheuse posture même si d'après ce que j'ai pu observer tu aurais pu avoir une situation encore plus indélicate."

Je ne peux retenir un rictus suivit d'une léger amusé face à l'otage. Lui aussi semblait entretenir une certaine curiosité à mon égard. Je jette un coup d’œil au cadenas brisé à mes pieds. Pesant le pour et le contre, j'observe l'homme face à moi. Il dit venir d'Yggradsil et je suis assez doué pour déceler les mensonges. Le regardant de sous mon capuchon, je lève une main en puisant au fond de mon être l'afflux de magie dont j'ai besoin. Je suis suffisamment entrainer et aguerris pour utiliser mes pouvoirs sans réelles difficultés. Ma main se recouvre d'une légère couche blanche avant d'être recouverte entièrement de givre et de glace d'où se dégage une vapeur aussi froide que celle d'un iceberg.

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Sans surprise, l'homme ne donna nul renseignement chiffré ou daté comme réponses aux questions de l'otage. Il aura tenté ! Sa réaction toutefois n'eut rien d'étonnant : faire profession de cambriolage avait dû lui enseigner la prudence. Pour ne pas dire la méfiance envers tout le monde. Ulter haussa les épaules avec fatalisme au constat du vagabond quant aux Grands de ce Monde. L'archiviste se demanda ce qui avait pu conduire cet homme à la rapine. N'avait-il jamais envisagé une profession honnête ? Ou l'avait-on renvoyé d'un précédent office ? S'était-il enfui après un drame ? L'estropié gardera ces curiosités pour lui et accueillit d'un petit rire la pointe à l'encontre des patriciens qui n'admettraient même pas une invitation à l'humilité de la part de Jupiter. L'érudit devint rêveur un instant. Il considérait ses nombreux souvenirs de consultation de la littérature romaine et répliqua :
« Connaissant ce qui est écrit du jaloux Jupiter et des efforts qu'il a mis à conserver son pouvoir, il me semble que ce n'est pas demain la veille qu'il descendra donner une leçon d'altruisme aux nobles. Voilà qui serait plutôt l'apanage de cet étrange dieu-charpentier crucifié... celui que vénèrent ces gens non moins surprenants que, si ma mémoire est bonne, l'on nomme chrétiens. Pauvres d'eux. En voici d'autres qui terminent aux arènes ou brûlés vifs... » Ce sombre constat peignit un air lugubre à ses traits. Ses pensées allèrent à ses compatriotes d'Yggradsil. Pourvu que la purge ne reprenne pas. Quant à la foi chrétienne, l'archiviste ne la partageait pas – voué qu'il était à ses dieux et racines. Toutefois, du point de vue purement philosophique et culturel, cette vision radicalement différente que prêchaient les disciples de ce Jésus l'intéressait – au même titre que tout courant intellectuel neuf. Mais l'infirme savait aussi que se pencher de trop près sur cette foi décuplerait ses ennuis. La prudence devait primer sur la voracité de son esprit. Préférant quitter ces sombres sujets, Ulter reprit, cédant à davantage d'espoir : « Ceci dit... je ne peux croire que cette caste nobiliaire qui a jadis produit des Ovide, des Marc-Aurèle, des Sénèque... puisse être entièrement égoïste... Est-ce naïf de souhaiter que Rome ne traverse qu'une mauvaise période et qu'un peu plus de sagesse, de mesure, prenne un jour le dessus ? » Une question tout juste murmurée – et presque davantage pour lui que pour l'encapuchonné, dont un court moment Ulter avait d'ailleurs oublié la présence.

Il secoua la tête contre lui-même en prenant conscience qu'il était encore sur le point d'entrer en une de ces discussions qui pouvaient partir loin. ...Et en se rappelant de la cocasserie de la situation, à causer philosophie et avenir de l'Empire, par terre, dans le bureau de l'homme dont il était le captif, et en face de son cambrioleur ! Cambrioleur qui s'amusait à se mettre à l'aise sur le coffre qu'il avait forcé. Si Tiberius savait que son mobilier aurait été fouillé et reçu le derrière d'un invité non désiré.
Ce dernier resta d'ailleurs comme sidéré, quand Ulter lui révéla sa situation. Il ne devait sans doute pas connaître le détail de la politique entre Rome et Yggradsil – aussi l'invalide imagina la surprise qu'il y avait à se trouver face à un otage. Un otage bien pratique en outre : il ne pourrait pas se servir de ses deux jambes pour suivre le chapardeur en chemin-retour sur les toits... Mais ce qui retint plus encore Ulter fut de voir l'absence dans laquelle se trouva plongé l'individu à l'évocation de son cher village. Un rêverie un peu trop longue pour qu'Yggradsil ne soit qu'un lieu dont le vagabond eut seulement entendu parler. En guise de réponse, Ulter afficha un rictus entendu. Que pouvait-il être allé fabriquer en sa contrée natale ? L'otage voulut accrocher le regard de l'homme et glissa :
« Yggradsil n'est tout de même pas un de tes terrains de chasse ? » Encore eut-il fallu s'entendre sur le type de chasse. « Je ne crois pas qu'il y ait grande richesse à y chaparder, alors quelque chose me dit que d'autres motifs t'y ont... retenu ? » Un temps. « Et dire que nous aurions pu nous y croiser de façon aussi fortuite que maintenant. » Amusant, tout de même, que diverses choses commencent à relier Ulter à ce voleur. Moins amusant était le rappel de sa situation périlleuse, cependant l'estropié hocha la tête à la remarque de son vis-à-vis. « Certes oui. La loi romaine sur les otages stipule qu'il faut bien les traiter. Mais même avec cette consigne, j'aurai pu tomber chez un gardien infiniment plus rude et méprisant que Genitius. » Un pli soucieux traversa son front. Que se passerait-il si Tiberius apprenait l'amour du captif pour une patricienne ? Ou même sa présente complicité à une rapine... par manque d'entrain à faire envoyer ce larron aux arènes pour quelques sesterces.

À son tour, Ulter ne manqua pas de se laisser surprendre par la démonstration qui suivit. Ses yeux écarquillés étaient maintenant tout entiers concentrés sur la pratique à laquelle se livrait le voleur. Cet afflux si caractéristique qui lui montait au bout des doigts. Une fine pellicule blanche qui finit par se changer en glace. Aspiré par le spectacle, l'otage avait les lèvres entrouvertes et ne remuait d'un pouce. La magie. Il maîtrisait la glace et, ainsi, était venu à bout du cadenas ! Ulter contempla les gestes de l'homme avec toujours cette même fascination qu'il avait face aux sorciers, quand bien même il en fréquentait un certain nombre à Yggradsil. Sans doute était-ce tout son intérêt pour les miracles de la Nature qui parlait en ses expressions captivées. En l'occurrence, de la nostalgie venait s'y mêler. Assister à la démonstration d'un sorcier ne raviva que d'autant plus en lui le cruel manque de ses compatriotes. Les visages de Falcon, Ñolofinwë et tant d'autres apparurent quelques secondes derrière ses paupières closes. Puis ramenant son attention sur la main glacée du larron, il sourit à sa question et rétorqua aussitôt : « J'ai le vilain défaut d'une curiosité jamais satisfaite. Répondre à une de mes questions m'en engendre dix autres. » Qu'il lui épargnera. Dans quel contexte avait-il connu ses pouvoirs ? Quelqu'un l'avait-il guidé dans l'apprentissage de la magie ? Et si Rome lui mettait la main dessus, vaudrait-il mieux les fauves comme voleur ou le feu comme sorcier ? « Mais on va dire que oui. » Oui... mais en fait non : « Ton lien avec Yggradsil se logerait-il en cela ? »
Singulière et riche rencontre, décidément. Ulter nota que ce larron venait de lui livrer son secret – potentiellement très dangereux en les murs de la Cité Éternelle. Qu'il lui faisait donc confiance. Il sentait de plus en plus que ce drôle de hasard, ayant mis nez à nez le chapardeur et l'otage, pourrait déboucher sur bien plus que le simple passage d'un intrus qui, d'ici un moment, allait décamper.
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The King of Thieves and the King of Rats

blending in the shadows is my specialty

Etait-ce naif de croire que Rome ne traverse qu'une mauvaise passe de son histoire ? De penser qu'un jour chacun des citoyens qui composent l'immense empire romain se lèveront tous égaux avec les mêmes droits et devoirs ? Les mêmes richesses et rang sociaux ? Que les pauvres et les miséreux auront un toit au dessus de leur tête pour passer la nuit ? Que ces mêmes gens que la haute société dénigre et ce plait à mépriser pourra côtoyer les mêmes lieux, les mêmes bains et le forum sans craindre de se faire molester ou brutaliser ? Bien-sûr que c'est être naïf. Il fallait être plus qu'optimiste et simplet pour penser que ce jour viendra. Et pourtant, cet otage semble y croire. Dire que je l'avais pris pour une personne sensée malgré sa situation. Au vu de ses propos, j'aurais pu croire qu'il était clairvoyant. Cependant sa naïveté est surprenante, rêver est une bonne chose mais il faut savoir faire la différence entre des songes et les différences nuances de gris de la réalité dans laquelle nous vivons. Dans la vie il n'y a pas d'un côté le bien et le mal, il y a une part d'ombre en chacun de nous. Ce qui compte c'est celle que l'on choisit de montrer dans nos actes, c'est ce qu'on l'on est vraiment. Et malheureusement, peu de gens choisissent de montrer la lumière qu'il y a en eux. Je ne suis point fataliste mais pourtant je sais pertinemment que l'obscurité qui ronge le cœur des hommes est bien plus forte que tout autre chose. Le mal et le vis sont bien trop tentant pour les refuser. Il n'y a que dans les contes que la lumière est triomphante. Il n'y a qu'à regarder la guerre entre les Troyens et les Spartes. Une guerre sanglante et ravageuse uniquement pour laver l'honneur d'un homme. N'y avait-il pas de solution plus pacifique ? Et plus près de nous, Romulus et Remus ne se sont-ils pas affrontés à mort dans le seul but de donner leur nom à l'Empire qu'est Rome aujourd'hui ? De plus, faut il vraiment évoqué la chasse aux sorcières ? Des innocents brulaient vifs uniquement parce qu'ils étaient différents ? Non, je ne suis point fataliste mais juste réaliste. A quoi bon se bercer d'illusions ?

L'otage se montrait de plus en plus curieux à mon égard et pour tout avouer cela ne me plaisait guère beaucoup. Certes, j'avais eu la confirmation qu'il ne trahirait pas ma présence mais en quoi cela justifierait-il le fait que je doives répondre à toutes ces questions ? Non pas que j'ai des secrets de la plus haute importance à cacher mais je n'aime pas subir un interrogatoire. Alors, lorsqu'il évoque une fois de plus Yggradsil et me demande s'il s'agit d'un de mes terrains de chasse, je me contente de le fixer de mes yeux. Cela sera tout ce qu'il obtiendra de moi pour le moment. Je n'ai nullement l'intention de confier ma vie à un homme dont je ne connais rien si ce n'est la position inconfortable dans laquelle il se trouve. Cependant, et à mon grand étonnement je dois dire, quelque chose me pousse à lui révéler l'un de mes secrets des plus importants. Peut-être est-ce du à son lieu d'origine ? Je ne saurais le dire mais je lui offre une petite démonstration de mes capacités magiques, quelques secondes rien de plus mais suffisantes pour qu'il comprenne comment j'ai pu briser aussi facilement le cadenas du coffre de son geôlier. Coffre sur lequel j'ai pris mes aises.

A la fin de ma démonstration rapide, le regard de l'infirme est toujours aussi emplit de curiosité et, je n'en doute guère, de questions aussi diverses que variés. Cependant, la question qu'il me pose m'amuse autant qu'elle m'insupporte. Il ne lâchera t-il donc jamais l'affaire ? Visiblement, il n'en avait pas nullement l'intention. Soit. Il n'obtiendra que de vagues réponses qui ne le le laisseront que dans le flou.

"Si ta véritable est question est de savoir si je suis un parent d'Yggradsil et si c'est cela qui me confère ce don, la réponse est non. Cependant, j'ai effectivement un lien avec ce village mais cela fait bien longtemps que ne j'y ais pas mis les pieds."

Cela fait presque quatre ans que je ne me suis pas rendu à Yggradsil, pas depuis la mort d'Uther et de Bando. Je ne parcourais plus les routes comme autrefois.

love.disaster

The king of Thieves
and the king of Rats
Le silence qui suivit les élucubrations d'Ulter fut éloquent. Son vis-à-vis restait sceptique, c'était le moins que l'on puisse dire. Devoir survivre au quotidien dans les rues de Rome, au nez et à la barbe des patriciens comme des autorités, avait dû lui faire voir le meilleur et surtout le pire. L'otage avait quant à lui grandi avec une vision exécrable des Romains. Brûleurs de sorcières. De Tatiana dont il avait lui-même tracé l'histoire en belle langue et belle calligraphie pour la bibliothèque d'Yggradsil.
Mais étonnement, depuis qu'il se trouvait retenu dans la Cité Éternelle, il était loin de n'avoir rencontré que des brutes sanguinaires ! Freya, son aimée ; la demoiselle Opsia Sollemnis, fille de sénateur et qui pourtant n'avait pas méprisé la conversation avec un barbare estropié... et l'avait d'ailleurs engagée ; même Tibérius qui le traitait bien. Entre ce constat et la fréquentation des monuments littéraires dont cette civilisation s'était montrée capable par le passé... Ulter espérait que quelque chose d'autre, de plus nuancé que la tragique situation actuelle, serait possible même si cela devait prendre du temps. Mais il en savait encore si peu, tenu entre les murs de cette domus l'écrasante majorité de son temps. L'avenir affinerait ses orientations.

Il ne fit qu'acquiescer à la réponse du brigand. Réponse évasive – et c'était normal. En découvrant ses pouvoirs magiques, couplé au fait qu'il connaissait Yggradsil, Ulter s'était emballé. L'espoir, sans doute, que cet homme soit bien davantage lié à son cher village qu'il ne voulait le dire... Que l'otage puisse obtenir, par ce biais, quelque récent écho de sa terre de racine qui lui manquait tant. Il eut un toussotement gêné. Fichtre ! Des mois maintenant à mariner à Rome loin des miens, avec trop peu de conversation, et je commence à faire n'importe quoi ! Car partir à poser moult questions à un inconnu venu chaparder, oui, c'était un peu n'importe quoi.

Cette pensée enfin plus raisonnable le ramena à tourner la tête vers l'entrée et tendre l'oreille sur ce qui pouvait se passer de l'autre côté de la porte. Dieux merci, rien pour l'instant. Mais s'il demeurait plus longtemps introuvable et que ce rustre de contremaître se mettait à le chercher ; si un esclave, un garde, ou le contremaître Flavius lui-même débarquait à l'instant, il ne serait pas déçu.
« Nous ferions mieux l'un et l'autre de quitter ce bureau. » nota-t-il. Son sérieux revenu le poussa à ajouter : « Je me suis emballé. C'était intrusif. J'ai souhaité un instant que tu aies encore des liens avec Yggradsil et qu'ainsi je puisse en entendre des choses récentes. » Il recommença, sur ce, à attraper ses jambes, les tourner, se pencher, se positionner dans le sens du départ. Tournant une dernière fois la tête vers l'encapuchonné il acheva dans un demi-sourire : « Les Genitius s'apercevront tout seuls qu'un visiteur a eu le bon goût de choisir leur maison. Mais ils ne sauront rien d'autre par moi. » Il attendra de se trouver seul à nouveau dans le bureau pour ressortir.
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» Les soins des Layndos [Juin 902]
» Une fête en grandes pompes [Ulter ¤ Juin 902]

LUNA NERA

Ñolofinwë Kirkja

Ulter Hërling

The King of Thieves and the King of Rats [Juin 902]