Un moment de paix [Juillet 902]

☾☾ Il reprit connaissance avec un mal de tête tel qu'il n'en avait jamais connu. Les yeux fermés, incapable de les ouvrir pour le moment, Vel tentait de remettre de l'ordre dans ses pensées se bousculant dans cet esprit tout juste éveillé. Que s'était-il passé ? Ou était-il ? Il n'entendait pas le bruissement familier des arbres de la villa Caesennius ni le brouhaha lointain de la ville romaine. Petit a petit, le jeune homme se souvint des instants précédant l'inconscience: il avait quitté Rome pour se rendre chez Caecia Isatis avec ses parents en vue d'un mariage prochain. Sur le retour il y avait eut un problème. Mais l'incident demeurait flou dans son esprit. Il se souvenait juste s'être fortement cogné la tête, entendre le cri horrifié de sa mère avant de plonger dans l'obscurité. Agacé de ne pouvoir tirer plus de sa mémoire, Vel fronça les sourcils, bougeant dans le lit où il était installé et qui était bien moins confortable que celui de sa chambre. Bons dieux ! Où était-il donc ?! Ses paupière papillonnèrent, peinant à réguler l'afflux soudain de lumière dans ses iris bleutés qui n'avaient vu le soleil depuis plusieurs jours. Mais ce n'était pas la lumière naturelle qui l'aveuglait: après quelques instants il discerna les quelques bougies brulant dans la pièce, dessinant une chambre modeste bien loin du luxe de sa villa romaine. Il voulu se redresser sur le lit mais grimaça tandis que sa tête était assaillie d'une douleur lancinante. Ce fut à ce moment qu'il remarqua sa quasi nudité, révélant par la même les hématomes de l'accident. Il passa quelques minutes à observer les bleus et les égratignures de ses bras tout en prenant sur lui de supporter le mal de tête toujours présent.

Alors qu'il se demandait encore où il se trouvait, la porte de la pièce s'ouvrit sur une jeune femme. Brune, élancée, sans doute plus petite que lui, jugea-t-il d'un regard méfiant. Bien qu'il ait toujours montrer une certaine aisance avec les inconnus, il avait toujours été à son avantage à Rome: c'était sa ville, son nom était connu ... Il avait le contrôle. Ici, d'ailleurs c'était où ici, il ne connaissait rien ni personne et son visage devait sans doute ne rien dire non plus à l'intruse qui s'invitait dans la pièce. Sa presque nudité n'aidait pas non plus: il se sentait fragilisé, comme lorsque ses fièvres d'enfant le clouait au lit à la merci de n'importe quelle âme bien ou mal intentionnée. Tandis qu'elle se présentait avec un sourire bienveillant, Vel ne pouvait s'ôter ce regard emplie de méfiance qu'il avait adopté dès qu'il avait ouvert les yeux. Azura Layndos ? Ça ne sonnait pas très romain tout ça ! « Où sommes nous ?  » demanda-t-il sans plus de cérémonie. « Où sont mes parents ?  » ajouta-t-il, tentant de dissimuler l'inquiétude qu'il ressentait à les savoir loin., peut être même morts.

☾☾ Les mots de la jeune fille lui paraissaient lointains, il les entendait comme si ses oreilles étaient plongées dans de l'eau, entendant sans écouter. Présent mais ailleurs. Vel n'essayait même pas de se concentrer sur la voix de la guérisseuse, encore chamboulé par ce qu'il venait de vivre sans parvenir à mettre le doigt dessus. Dans sa mémoire revenait le choc de la chute, l'inquiétude la précédent mais rien de l'évènement qui lui avait valut de se retrouver si loin de chez lui, si loin d'un visage familier. Le blond prit quelques instant sa tête dans ses mains, essayant par ce contact de se reconcentrer sur le monde qui l'entourait. « Yggradsil ... ?  » répéta-t-il encore dans les vappes de son inconscience récente. Le nom lui disait quelque chose mais il aurait bien été incapable de remettre la ville sur une carte. Son cerveau se mit en route, cherchant dans les méandres de ce qu'il savait, d'où il connaissait cette ville mais tout ce qu'il parvint à faire fut d'observer les alentour et d'en emettre des déductions logiques. Si elle était guérisseuse, et donc l'une des personnalités les plus importantes de la communauté, sa demeure était modeste. La chambre où il était installé devait être aussi grande que celles des domestiques de la villa des Caesennius et le bois qui la recouvrait offrait, certes, un peu de chaleur, mais témoignait d'un mode de vie bien moins luxueux que celui auquel il avait l'habitude. Il finit par répondre, encore ailleurs, aux questions de la jeune fille sur son état. « Non. Ça va. A part un mal de crâne digne des travaux d'Heracles, je pense que je ne suis pas à plaindre.  » assura-t-il tout en songeant qu'il ne se sentait guère prêt à tenter quoi que ce soit pour fuir. Sa migraine ne semblait pas vouloir se calmer et avec un regard en biais vers la guérisseuse, il lui demanda. « Vous posez toujours autant de question ou j'ai juste la chance ?  » Sa mauvaise humeur n'était du qu'à la sensation d'impuissance qui le taraudait. Loin de chez lui, dans un lieu dont il ne connaissait rien ni personne, il se trouvait dans une situation délicate devant une parfaite inconnue qui, vraisemblablement, n'avait pas attendu son consentement pour lui ôter ses vêtements. Sur la défensive, réflexe de sa vie romaine, Vel se demandait si elle était réellement ce qu'elle prétendait être ? Qu'est-ce qui prouvait qu'il ne s'agissait pas d'une femme appartenant à un groupe de bandit ?

Il soupira. Elle n'irait pas bien loin avec son simple prénom, conclut-il. « Je m'appelle Vel. Je suis citoyen de Rome et ... Ce qui s'est passé ... C'est assez flou dans ma tête.  » répondit-il avec méfiance, peu désireux de se voir devenir l'objet d'un chantage, un objet d'échange contre de l'argent. Mais alors qu'il évoquait ses parents, l'inquiétude revint. « Votre amie, elle a trouvé personne avec moi ? J'étais partie avec mes parents à quelques heures de route de Rome. Il devraient être avec moi sinon je ne sais pas où ils peuvent bien être.  »