EVENT I » l'invitation douteuse [TOPIC ÉVÈNEMENT DU FORUM ¤ Août 902]

l'invitation douteuse

event #1

☾☾ Il ignorait ce qu'il se passait du côté de la loge romaine: il lui semblait entendre des éclats de voix, mais perdu dans la foule des spectateurs hurlant leur contentement, il peinait à avoir une véritable idée de ce qu'il se passait. D'ordinaire, jamais il n'aurait accepter de venir sans avoir une idée précise du lieu et des échappatoires qu'il offrait ou sans faire appel au don du troisième oeil. Mais l'invitation l'avait prit de cours et cela faisait bien des années qu'il n'avait pas croisé la route de Genevra. Son regard sévère était surplombé d'un duo de sourcils froncés, témoignant de la lutte intérieur du sorcier. Quelque chose ne fleurait pas bon dans cette invitation et il n'avait pas forcément envie de savoir quoi. Si cela n'avait tenu qu'à lui, il aurait jeté la sorcière sur son épaule pour fuir loin d'ici. Tout, à Rome, lui rappelait Tatiana et son supplice. Tout lui donnait envie d'exploser. Seule la voix bienveillante de la disparue lui murmurait de garder son calme, de ne pas verser dans cette obscurité dont il ne pourrait pas revenir. La magie était une lourde responsabilité dont il ne fallait abuser, d'autant plus sur des innocents. Snöfrid considéra la foule: étaient-ils vraiment innocents ? Comment pouvaient-ils se réjouir de voir la mort comme un spectacle divertissant alors même qu'ils étaient incapable de faire face au moindre danger ? Se rendaient-ils compte du ridicule de la situation. Le toucher de Ñolofinwë le ramenait sur la terre ferme, au moment présent mais dans le regard de sa compatriote magique, il sentait la même rage, les mêmes ténèbres dansant au fond de son regard emplie de sollicitude pour ses amis. « On pourrait s'en aller. Personne ne le remarquerait ... » tenta-t-il avec le vain espoir qu'elle accepte. Il savait qu'elle n'abandonnerait pas ses amis ici, mais il ne pouvait sauver tout le monde. Il savait que si le choix se présentait, il la laisserait le haïr plutôt que de connaitre le même sort que Tatiana. Mais l'heure n'y était pas, rien ne nécessitait de telles extrémité et il demeurait, raide et tendue, aux côtés de la jeune fille, contemplant ce que Rome avait de plus divertissant à proposer. « Cesse de penser avec tes pouvoirs ... » chuchota-t-il malgré tout. « Si tu laisse échapper la moindre étincelle, tu nous condamne tous. Ils ne te laisseront pas l'occasion d'embraser l'arène. » Il commençait à les connaitre, les romains .. Quelque part, il était sur que l'empereur avait prévu cette possibilité.

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EVENT I

L'invitation douteuse

~ Musique d'ambiance - Mort dans le cirque,
OST "Ben Hur" ~

L'émoi provoqué par la course de chars devait redescendre à travers les gradins. Les spectateurs s'étaient émoussés dans les paris pris à tue-tête et la défense de leurs champions. Les cris laissaient à chacun une gorge sèche, une voix de rocher ; la chaleur trempait les tuniques, dégoulinait le long des gorges, chargeait l'air de l'âcre odeur des combats qui ne se jouaient pas seulement au cœur de l'arène.
Une armée d'esclaves circula pour proposer aux plus riches un rafraîchissement, quelque linge trempé ou parfumé, une confiserie. Ainsi les humeurs auraient-elles le loisir de décroître au cours du bref entracte, pour mieux éclater de plus belle avec le lancement du prochain jeu. L'aurige vainqueur en profitait pour parader auprès de ses plus zélés supporters, sa silhouette comme transfigurée par la couronne d'or qui, sur sa tête, tendait un miroir au soleil.

Du ventre puissant des trompettes jaillit l'annonce de la reprise des divertissements. Les uns et les autres regagnèrent leur place ; tous les regards se retournèrent vers la piste d'or. Ou plutôt, vers la rangée de grilles qui s'ouvrirent, dans les mêmes grincements métalliques, sur les dizaines de noires gueules béants le long des murs. Les cris de la foule, que déjà la curiosité aiguillonnait à nouveau, accueillirent lions et panthères qui parurent sortir de terre. Des piquiers devaient stimuler les plus réticentes à s'élancer au milieu de la scène, mais la plupart des bêtes étaient si affamées, si excitées par leur maintien dans le noir juste avant le numéro, qu'elles furent d'elles-mêmes rapides à fuser les unes vers les autres. Les unes contre les autres. Pour le plus grand plaisir de l'assistance, nécessité faisait loi – et faim jaillir ce que chacun de ces animaux avait en lui de plus instinctif.
Les yeux avides suivirent les roulades des lions, les courses des panthères. Les queues battirent l'air, les griffes et les crocs déchirèrent les chairs. Le sable s'imbiba de rubans écarlates. Des sursauts de la foule accompagnaient les giclées de sang. Bientôt, cinq carcasses jonchèrent le sol, leur dernier lit. Et le spectacle de continuer !

À peine ces premiers combats achevés, d'autres bêtes encore plus exotiques parurent, soulevant des acclamations époustouflées tout le long des gradins. Sans l'offre de ces jeux, jamais un seul de ces Romains n'aurait vu de sa vie un jaguar, un léopard, des tigres – ils y en avait même un blanc comme neige importé spécialement des confins de l'Empire. On lâcha aussi un éléphant, qui plus que tout autre animal fut contemplé par l'assistance. Ses barrissements fendirent l'air tandis qu'il prenait en chasse les autres bêtes, dans la cacophonie de leurs cris mêlés.
Quand la foule eut sa dose de bataille, on capta son attention grâce à la parade du pachyderme. Ses pattes tracèrent sa route au plus près des gradins, accompagnées d'une fanfare. Pendant ce temps, on traîna au cœur de la scène une gigantesque structure munie d'un rideau tiré. Ainsi, les spectateurs fascinés par l'éléphant ne purent prêter nul regard aux sinistres préparatifs qui s'y orchestraient.

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Enfin, l'éléphant et ses dompteurs quittèrent la piste. Levée de rideau. Report de sa lourde charpente en coulisses. Les yeux revinrent au centre du Colisée ou semblaient attendre, immobiles, d'autres bêtes recroquevillées sur elles-mêmes. Bien calmes par rapport aux précédentes... On ne distinguait que le dos de leurs fourrures. Quand quelques-unes se redressèrent, surprise générale : c'étaient des dizaines de femmes et d'homme, affubles de peaux animales cousues à même la chair. Silence de stupeur. On put entendre un peu leurs pleurs. Mais aussitôt furent-elles recouvertes de quatre coups de trompettes amorçant le sacrifice. Un homme en habit de Mors, personnification du Trépas, fit son entrée, la face grimée de cendre. Une prêtresse vêtue de noir l'accompagnait et clama : « Ô Dieux de Rome ! Puissants ! Daignez accepter la vie de ceux qui ont osé nuire à l'Empire ! Voici des bandits, des séditieux, des voleurs, des sorcières, des chrétiens, par lesquels notre grandeur ne saurait être souillée ! » Et une longue note de trompette résonna comme leur glas.

Dans les gradins, l'ambiance avait changé. La foule, chauffée à blanc par les précédents numéros, trouvait un objet de haine commune sur lequel déverser ses passions à vif. L'on put entendre rires, commentaires hargneux, voir une forêt de doigts pointer tel ou tel de ces malheureux. Les uns pleuraient, blottis entre eux. D'autres tremblaient. Les plus vaillants priaient ou restaient les yeux fixes à sonder le ciel. Le long des bancs, certains membres de l'assistance préféraient détourner le regard loin des condamnés au corps lardé de plaies. De rares spectateurs déglutissaient, soupiraient ou daignaient accompagner de leurs prières le trépas des suppliciés.
Ceux-ci venaient d'être rejoints par un second groupe de captifs, qui avaient marché chacun sous le poids d'une poutre transversale étroitement encordée à leurs bras étendus. Les poteaux disséminés çà et là dans le sable, jusqu'alors sans usage, allaient trouver leur cruelle fonction. Une armée de bourreaux approcha. Sous les yeux épouvantés des camarades de misère que des lanciers tenaient tranquilles, on cloua les poignets des crucifiés, on les hissa avec l'efficacité redoutable de l'habitude. L'arène s'emplit de leurs hurlements. L'écho les décupla au cœur d'un silence de plomb, que seule une grappe de spectateurs osait troubler en huant les malfrats mis à mort. On réclamait justice dans le sang. Ce fut bientôt, sous les yeux de Rome et des Yggradsilois, un sinistre cercle de corps qui paraissaient désossés tant ils se tordaient de douleur. Cortège de pantins désarticulés, totalement nus, pendus au bois du supplice.

Du haut des croix, les malheureux allaient assister en contrebas à l'exécution des camarades grimés en bêtes. Une nouvelle fois les grilles s'élevèrent, et des bouches du Colisée sortit une meute de lions affamés. L'odeur de sang que dégageaient les corps meurtris aida d'autant plus à attirer les fauves sur les suppliciés. Déjà éreintés de douleur, ils eurent à peine la force de la fuite désespérée. Il ne fallut pas longtemps pour que le plus gros d'entre eux meure sous les crocs. Seuls quelques uns s'époumonaient à courir en tous sens, portés par l'ultime énergie de la panique. Il en fut rapidement fait de tous, sous les applaudissements de l'assistance – quoique beaucoup plus clairsemés que lors de la course de chars et des combats de fauve. C'était la partie des jeux qui jouissait du moins de suspens... Heureusement que l'on gardait le meilleur pour la fin : le tournoi de gladiateurs.

Quand la piste d'or ne fut plus qu'un amas de charpies, on disposa du bois et des cordes d’étoupe au pied de chaque croix, avant d'y mettre le feu. Ce fut alors aux crucifiés d'expirer dans leurs ultimes hurlements. Ils avaient presque de la chance d'être achevés si rapidement, brûlés pour les besoins de l'avancée du spectacle : ceux que l'on crucifiait au bord des routes pouvaient agoniser jusqu'à quatre jours. Pendant ce temps, des esclaves débarrassaient ce qu'il restait des condamnés dévorés par les fauves. Le cœur du Colisée s'enténébra de cendres. Le public romain revendiquait sa vaillance et ne s'offusquait pas de la puanteur qui allait demeurer... au moins jusqu'à ce qu'on déverse assez de centaines de litres d'eau sur les brasiers pour pouvoir lancer le dernier divertissement.

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we create our own fate

Every human being is a puzzle of need.
You must become the missing piece.

☾☾ Alors qu’elle pensait le pire passé, la foule devint de plus en plus attentives et excité par le spectacle. Le bruit des grilles abîmé par la pluie, le froid et la rouille se fit entendre afin de laisser la piste se faire envahir par des bêtes féroces. Des animaux affâmé condamné à s’entretuer. Le coeur de la jeune femme se serra comme brisé par ce qu’elle voyait. Elle tentait de se rappeller avec véracité des mots de son professeur et être qu’elle aimait du plus profond d’elle-même. Le sang immacula le sol, laissant des traces et des grumots de sable et de sang.

Ñolofinwë prit sur elle devant se défiler d’animaux qui n’avait rien a faire ici, mais qui devrait être dans leur environnement naturel. Elle n’a jamais aimé la cruauté envers les animaux au contraire elle sait leur âme pures contrairement aux humains. « Quand est-ce que ça va finir ? » A ses mots elle vit au centre des boules de poils enrouler les uns sur les autres, comme des peaux, elle comprit bien vite que ce n’était rien d’autre que des hommes, des femmes, des gens pas comme il faut pour ses ô noble Romains ! Un frisson parcourut la colonne vertébrale de Ñolofinwë quand elle les vit se faire dévorés, crucifié… « Je vais vomir... ». Une rage profonde l’envahit quand elle vit briller dans ses pupille les flammes jaillissant des corps brûler. Corps quasiment sans vie, on pouvait entendre les hurlements, puisés dans leur dernières forces, l’odeur nauséabonde des corps, de la chaire qui brûler et maltraité durant des jours pris possession des arènes. Elle chercha le regard d’ülter et azura dans la foules, serrant ses mains afin de ne pas tout brûler. Elle se conssumait de l’intérieur. Ñolofinwë était remplie de diverses sentiments affutant son désir de partir et de mettre en place un plan pour renverser cette Rome moisie jusqu’à la racine. Impossible d’avoir de jolie fleure avec une racine pourrie. Elle regarda en l’air fixant l’empereur… Cet homme abjecte… elle le hait… Tatiana a eut le même destin et c’est ce qui l’attend si on découvre ce qu’elle est maintenant… Il est temps de mettre fin à se règne.

CODAGE PAR AMATIS

l'invitation douteuse

event #1

☾☾ Ce qui avait commencé avec un ennui sévère prenait une autre tournure. Vel n'avait montré que peu d'enthousiasme face à l'invitation faite aux gens d'Yggradsil, se souvenant du court séjour qui lui avait couté une partie de sa dignité. Le fuite avait été plus aisée qu'il ne l'aurait pensé et il s'était demandé, une fois rentré chez lui, si la guérisseuse n'avait pas légèrement surjoué pour lui permettre de partir. A présent, elle était là et ne ressemblait en rien à la femme fière et savante qu'il avait, sans une once de culpabilité, accusé de voyeurisme. Comment pouvait-on passer de guérisseuse à esclave si soudainement ? Etait-ce du cinéma ? Etaient-elles stupides au point de songer qu'elles ne se feraient pas prendre ? Vel était bien placé pour le savoir: un mensonge finissait indéniablement par être trahie. Ce serait peut être une gaffe, un regard ou un mot, cela ne viendrait peut être même pas d'elle, mais elles se feraient prendre c'était sur. « Arisinia ... C'était bien ta nouvelle servante qui n'était à ton gout non ? » demanda-t-il avec un sourire en coin. La jeune fille leva les yeux vers son frère, interrogatrice. « Euh ... Je n'irais pas jusqu'à dire cela ... Elle est brutale et peu soigneuse mais ... » Vel ne l'écoutait plus. Prenant sa main, il la traina derrière lui jusqu'au petit groupe. Contre toute attente, il brava ce qu'il avait lui même déclarer, baissant le torse pour saluer l'hommen d'autorité qui se trouvait dans La Tribune. « Consul. » le salua-t-il tandis que la petite voix d'Arsinia répétait ses mots comme un écho. Vel, lui, posa un regard inquisiteur sur la brune qui accompagnait la guérisseuse, la fixant un long moment avant de lancer « C'est une bien ingrate servante que vous avez là, ma dame. » fit-il mine de constater avec une tristesse feinte. « Vous déshonorer ainsi devant le consul ... » souffla-t-il alors d'un air désolé. « Vel ! » le réprimanda Arsinia en s'accrochant à son bras. « Arrête je t'en prie. » lui chuchota-t-elle. Peu désireux d'être distrait pas sa cadette, il lui caressa les cheveux en signe de se taire.

Si Arisinia fut blessée, elle n'en dit rien et le regard de Vel en disait long, elle s'écarta un peu, observant son frère et la jeune femme, puis le consul tandis que la servante en question s'était frayé un chemin jusqu'à l'infirme. Vel, lui, n'en avait pas terminé. « Une personne aussi délicate que vous ne mérite pas un tel traitement, et encore moins d'avoir à punir de la si mauvaise graine. » son regard azur la quitta un instant pour aller se poser sur la guérisseuse auprès du jouet du moment qu'avait apporté le Consul avec lui. C'est ça ... Prends pas trop tes aises quand même. songea-t-il avant d'offrir un grand sourire à la dame. « Je me ferai un plaisir de vous la racheter. Ma soeur a une servante, un peu maladroite mais bien plus docile qui siérait à merveille à votre personne. Quand à ... Cette jeune fille et bien ... Nous manquons de monde aux cuisines de la villa. » expliqua-t-il dans le plus grand des calmes. « Nous y serions tous deux gagnants: l'empotée de risquera pas de cause de problèmes à quelqu'un d'autre et vous auriez une servante » Il se tourna alors vers le Consul, offrant un nouveau sourire de convenance. « Enfin, si notre sage consul ne désire point s'en encombrer lui même ? Je ne voudrais pas vous privé du droit de punir cette servante insolente. » Son père le tuerait pour ce qu'il venait de faire mais pour Vel, tout moyen était bon pour se faire remarquer. Il avait déjà envoyé Kaeso moisir au fin fond de l'Europe ... Il n'y serait pour rien si sa personnalité convenait mieux à la politique romaine du moment.

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L'invitation douteuse
Ulter serra les dents quand la gifle détonna contre la joue de son amie. Freya n'avait pas eu le choix. Elle jouait très bien son rôle et eut l'excellente idée d'ordonner à son esclave d'un jour de s'asseoir tout contre lui. L'otage aurait volontiers souri à son aimée mais il ne dut rien montrer. Aussi préféra-t-il ne pas la regarder, plutôt que de risquer la moindre expression traîtresse. Les Dieux puissent-ils lui donner l'occasion, plus tard, de parler librement avec l'élue de son cœur !
Tiberius reçut d'un sourire affable les excuses de la demoiselle Mancini. Elle n'y était pour rien et avait dûment puni son esclave. L'affaire pouvait en rester là. Flavius quant à lui rongeait son frein. Il en aurait bien remis une couche, ordonnant à la nigaude de laver les dégâts à ses bottes. Cependant un regard à Tiberius lui indiqua qu'il préférait clore l'incident. Son contremaître n'eut pas à remettre de l'huile sur le feu s'il ne voulait être mal vu à son tour. L'homme s'en revint donc sur le spectacle.
Déjà, Ulter se fichait de ses supérieurs : Azura était auprès de lui, elle seule comptait. Des mois qu'il n'avait pas revu sa chère amie et voici qu'elle se trouvait là ! Tant d'émotion lui serrait le cœur que l'érudit pria pour que rien de son comportement, ni ses prunelles accrochées à la guérisseuse, ne brisent sa couverture. « Seigneur. » l'entendit-il l'appeler alors qu'elle le remerciait pour l'eau. Même lui, otage de Rome, était si loin au-dessus d'une esclave... L'horreur de la servitude le gifla plus que jamais. Quand on la vivait intimement. Quand un être cher était dégradé. Même si tout cela n'était qu'une simulation, ce que celle-ci confirmait révulsa l'archiviste. Un argument de plus à sa liste à charge contre Rome.
« Je t'en prie. » répondit-il, sobre, à Azura. Elle but son verre, se confondit encore en excuses devant le contremaître et Tiberius, puis s'installa contre lui. Bien joué, Freya. Merci. Il se pinça la lèvre, désolé, en la voyant chercher par réflexe ses amulettes, et lui rendit discrètement son sourire. Ulter saisit la perche qu'elle lui tendit en jouant la fille naïve en quête d'explications, prétextant venir de loin : « Eh bien, ces coursiers viennent de tout l'Empire. Chacun aux armes de sa province. Suivront des animaux sauvages en parade devant l'empereur : il faut croire qu'il a même besoin de l'allégeance de la faune. » ajouta-t-il un ton plus bas, rictus en coin. Mais qu'importait la description du spectacle ! Il devait surtout jouer le jeu et rebondir quant à la prétendue contrée lointaine de l'esclave d'un jour. L'otage simula donc, compatissant : « Oh... Ta famille a-t-elle été prise aussi ou est-elle encore au pays ? » Elle pourrait broder le sous-texte de son choix quant à cette famille, lui parler en réalité des Layndos, donner des nouvelles. Il guetta un infime moment à l'abri de la vigilance pour se pencher au plus près d'Azura et articuler, bas entre ses lèvres serrées : « Roland est un Ro... » Il n'eut malheureusement pas le loisir d'achever... et n'aura peut-être même pas été entendu : en tonitruante fanfare, on annonça la parade des fauves suivie de leur joute.

Ce fut ce moment que choisit un jeune patricien et la noble dame avec lui pour s'approcher du Consul. Tiberius attendit que la puissante musique se calme un peu, pour se tourner vers le sieur et le saluer d'une vigoureuse poignée de main. « Vel Caesennius ! Quelle bonne surprise de vous voir ici. J'ai entendu dire que vous aviez comme... disparu ces derniers temps. J'espère qu'il ne vous est rien arrivé de fâcheux ? » Il désigna une place sur le banc. « Installez-vous donc un moment. » Il ne manqua pas de proposer de même à la demoiselle, qu'il salua au passage : « Dame Arsinia. »
Ulter entendit vaguement un échange de mondanités entre le Consul et deux patriciens, mais il avait d'autres tristes chats à fouetter. Azura blottie contre lui, encore chamboulée, et ce spectacle infect. Pauvres bêtes. Elles n'avaient rien à faire là. Et cet Empire qui gaspillait de l'or pour faire venir ces fauves alors que sa plèbe crevait de faim. Fallait-il croire que quelques heures de divertissement rachetaient tout ?! Ce qui suivit fut plus abject encore : une grappe de condamnés, des peaux de bêtes cousues à même leur chair, livrés aux crocs des fauves. Y avait-il sérieusement un crime qui mérite cela ? À quel moment sortait-on de la punition pour entrer dans la perversion qui se grime en justice ? L'archiviste se tétanisa devant la boucherie. Souffle encagé en sa poitrine. Main serrée, os crispés à s'en blanchir les phalanges. Sans vraiment entendre ce que disaient Vel et le Consul, il eut assez de lucidité pour se tourner vers Azura, avoir le réflexe de passer délicatement un bras autour de ses épaules, la réconfortant, l'invitant à enfouir son visage contre lui si elle voulait. Lorgnades suspicieuses et ricanement des gardes. « Sa maîtresse apprécierait peu qu'elle vomisse encore ou tourne de l’œil. » servit-il, polaire, sans même les regarder. Et puis merde : qu'ils croient qu'entre deux propriétés de Rome, l'on pouvait bien se soutenir sans se connaître.
Ces traînées de sang. Ces cris. Cette odeur de chair brûlée. Ulter frémit au spectacle des crucifiés. Azura pourra sentir un bref tremblement parcourir son bras. Mâchoire décrochée, l'otage n'arriva pas à se détacher de ces corps nus, tordus par la douleur, de ces poitrines qui semblaient se déboîter à force de suffoquer. Aux jambes des malheureux : soubresauts qui les faisaient pousser encore et encore pour inspirer – leurs propres réflexes de survie étaient leur pire ennemie dans ce supplice.
Il fut tiré de sa sidération par les mouvements autour. Azura toujours blottie contre lui, Ulter se fit violence pour tourner la tête. Suivre de loin ce qui se jouait ; mais presque en automate, comme si le reste de sa personne demeurait éteinte et son esprit resté là-bas, pendu lui aussi à ces croix – ç'avait été l'horreur de trop.

L'otage retrouva peu à peu ses moyens. Il inspira. Reprit souffle et pleine conscience quoique son cœur cognait encore en désordre. Alors, il s'intéressa aux paroles du jeune seigneur qui conversait avec Tiberius. Est-ce qu'il... proposait d'acheter Azura ? Encore retourné par bien trop d'émotions à vif devant le spectacle, Ulter n'arriva pas à se retenir à temps et grogna un « Quoi ?! » bref, coupant. Ses yeux du même coup avaient vrillé sur Vel qui, tout sourire, adressait son idée à Freya. L'archiviste voulut se reprendre, conserver un regard neutre, mais il était de ceux dont le regard neutre pouvait assez aisément devenir un regard noir. L'otage avait accumulé sa dose de colère au fil des jeux. Outre sa consternation à entendre sa meilleure amie négociée comme un meuble, et à voir la nommée Arsinia apparemment blessée, il doutait fortement que ce patricien se plaisait à racheter tous les esclaves surpris à fauter, par la seule grandeur d'âme d'en soulager leurs maîtres. Alors de quoi se mêlait-il, celui-là ? TouTES les esclaves, c'était déjà plus plausible. Ou alors... pour plaire à Freya ? Ou il y avait autre chose. À quoi jouait-il ? Il glissa un oeillade à Azura, attira son attention d'une petite pression de la main encore à son épaule, et haussa un sourcil intrigué équivalant à un : ''Tu connais ce type ?''

Le Consul s'étonna de la proposition que Vel adressait à Dame Mancini. Avec force compliments comme l'élégant patricien savait en formuler, ce dernier suggéra un échange d'esclaves. Le jeune Caesennius serait fort généreux de s'encombrer d'une pareille servante. Avait-il plutôt quelque plan derrière la tête ? Tiberius le savait habile à l'art de la manigance. Il écouta, sourire aux lèvres, puis se retourna brusquement avec contrariété en entendant l'intervention soudaine de l'otage. Tiberius darda Ulter assez longtemps des pupilles pour lui faire comprendre qu'il serait bien qu'il s'en tint là.
Ce que l'archiviste fit. Il avait déjà été corrigé pour avoir chahuté un patricien deux semaines auparavant – et ne prévoyait pas de remettre le couvert. Or Azura était là. Il ne fallait pas envenimer la situation. Ulter se rassura par l'idée que sa bien-aimée saurait certainement gérer l'affaire : Freya ne laisserait pas sa fausse esclave être vendue. Il la regarda, feignant d'attendre le dénouement avec les autres. D'ici à ce que la demoiselle Mancini prenne sa décision, Tiberius se retourna vers Vel qui, diligemment, lui laissait la priorité pour un éventuel rachat de la fautive. « C'est très aimable à vous, mais je vous laisse traiter de cette affaire avec la principale intéressée. » dit-il avec au passage un regard déférent à Freya, puis un coup d'œil un peu désolé vers Arsinia que les idées de son frère semblaient gêner. « Je suis parfaitement bien loti en esclaves. Et vous trouve bien bon de vous proposer pour débarrasser Mademoiselle d'une si mauvaise acquisition. »
''Mauvaise acquisition.'' Je t'en ficherai. Ulter ravala des mots plus fleuris au fond de sa gorge et glissa un regard navré à Azura. Les Dieux soient avec elle... Puisse-t-elle bientôt être sortie de ce pétrin.
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La claque de Freya, comparé aux coups que Roland pouvait me donner, ne me faisait pas si mal. Surtout que je pouvais du coup me nicher contre les jambes d’Ulter. Ça me rappelait lorsqu’on était gamin et qu’il étudiait sagement en s’appuyant sur la table et que moi j’étais assise par terre, appuyé contre sa chaise avec mon livre entre les mains à m’agiter un peu. Ou qu’il s’installait sur un rocher au soleil après qu’on se fut baignés et que comme d’habitude, je m’installais à ses pieds. Ça ne m’avait jamais gênée et aujourd’hui encore moins. Je lui demandais « timidement » des informations en regardant le spectacle, si on pouvait appeler ça comme ça… avant de lever les yeux vers lui et sourire un peu :

« Oh non mon seigneur, ils sont encore là-bas. J’ai deux frères et deux sœurs. Ils vont tous très bien. Je sais que je leur manque beaucoup… »

Traduction : je vais voir régulièrement ta famille, ils vont tous bien, mais qu’est-ce que tu leur manques. Je souris un peu en reprenant :

« Quand je suis partie, mon petit frère était gaga devant la fille qui venait tout juste de naître d’une des voisines. »

Petit frère. Ulter était plus jeune que moi : c’était comme un petit frère pour moi. Et ça il le savait parfaitement, j’essayais de lui donner quelques informations sur le village ! Mais la fanfare arriva et je ne compris pas ce qu’il voulait me dire sur Roland. J’avalais péniblement ma salive en voyant Vel arriver. Je détournais aussitôt les yeux en essayant d’être très discrète, me recroquevillant sur moi-même. Est-ce qu’il allait me dénoncer ?! Je lui avais sauvé la vie et j’avais pris soin de lui… J’évitais soigneusement de le regarder. Je me blottis d’avantage contre Ulter, au besoin… j’observais la foule en cherchant une échappatoire. Au pire : je partirais en courant ! C’était toujours ça. Je détournai les yeux de la bataille des fauves, le cœur soulevait pour me cacher les yeux contre la cuisse d’Ulter en cherchant sa main pour la serrer.

Je reviens vers la piste quand on appela les condamnés à mort… Je sentis une boule de bile me remonter dans la gorge et je l’avalais avec difficulté avant de me nicher à nouveau contre mon ami, mais je savais… je savais que ça pouvait être lui. J’avais saisi sa main pour la serrer dans la mienne en chuchotant aussi bien pour lui que pour moi, ravalant également mes larmes :

« Je ferais tout pour que ça ne t’arrive pas… Je te le promets… »

Je ne pouvais accepter qu’on fasse du mal à Ulter. J’eus du mal à me sortir de ses bras, tremblant encore un moment, avant de relever la tête en entendant Vel. Il voulait m’acheter ?! Mais c’était une blague ! J’avalais péniblement ma salive, en retenant derrière mes dents une vague d’insultes à l’encontre de Vel. Je hochai la tête en regardant Ulter en articulant silencieusement : « Je l’ai soigné. ». Pourquoi il faisait ça ?! La cuisine ?! Je bafouillai en levant vers lui un regard emplis de « Sérieusement ? Pourquoi ?! » :

« Je… je… je ne suis pas douée en cuisine… À part… à part faire des soupes ou des galettes mon… mon seigneur je sais rien faire ! »

Les galettes, on en avait fait des carnages avec Ulter, surtout chez lui avec une corne de bière ! Doux souvenir. Je tournais la tête vers Freya en suppliant :

« S’il vous plaît ma dame… Je ferais des efforts ! Je… je vous décevrais plus ! »

Je savais pas si c’était courant qu’un esclave supplie, mais c’était hors de question que je serve cet homme. Surtout en cuisine où j’étais plus un danger ambulant qu’autre chose… Je regardais sa jeune sœur avec attention avant de rassembler légèrement mes membres, j’étais au besoin prête à bondir. Je serrais plus fort la main d’Ulter avant de soutenir le regard de Vel comme pour le défier de parler sur ce qu’il avait vécu à Rome. Il avait été absent, mais c’était moi qui lui avait sauvé la vie ! Moi et Nolo !

♛

Freya & all

Du pain et des jeux

Freya se demandait si c'était une bonne idée que d'avoir permis à Azura de pouvoir s'assoir aux côté d'Ulter. Sous couvert d'un ordre dédaigneux donner à la guérisseuse de s'assoir ici, elle avait laisser parler secrètement son coeur en permettant à cette dernière d'être pour l'espace d'un instant, aux côtés de cet être cher dont elle avait été depuis trop longtemps séparée. Néanmoins, elle ne devait pas faire taire son esprit analytique car, on ne lui pardonnerait aucune conduite suspecte, même si elle était fille de la noblesse romaine.

Prudence donc. Freya était rompue depuis son plus jeune âge aux arts de la comédie et des spectacles que sa belle-mère organisait pour ses invités. Il lui était donc facile de se glisser dans la peau d'une noble passablement irritée par une esclave guère douée. Aussi, elle ne manqua pas d'afficher sans trop en faire, une mine tiraillée entre l'agacement que provoquait cette esclave et le désire d'épargner à celle-ci d'autres punitions. Il était de notoriété public que Freya n'était pas une noble cruelle ou injuste. Elle avait l'impression d'être une équilibriste juchée sur le fil d'un rasoir.

La suite du spectacle arriva. Pour sûr, l'Empereur n'avait pas lésiné sur le...spectacle. Grandeur et décadence, horreur et tragédie. Ainsi il pourrait montrer aux habitant d'Yggradsil combien Rome était puissante et cruelle. Tandis que l'on crucifiait ces pauvres êtres humains sur leur croix, la sorcière lutta contre elle-même pour rester stoïque. Probablement aurait 'elle vendu son âme a Pluton lui-même pour ne pas être là à ce moment précis. A chaque hurlement, ses épaules tressautaient. Sa gorge se serra lorsque ses yeux rencontraient les marres de sang produites par les bêtes qui se repaissaient des condamnés en peaux d'animaux. Cependant, pas un instant elle ne détourna les yeux. Elle se disait que sa "souffrance" n'était rien en comparaison à celle des condamnés qui se mourraient dans l'arène. Alors elle tiendrait le coup.

L'arrivée d'un autre noble l'interpela, visiblement alarmé de constater la médiocrité de sa nouvelle esclave. Jouant toujours le rôle de la maîtresse embarrassée, Freya fit preuve de courtoisie comme une jeune femme de son rang devait le faire. Elle arbora un sourire de circonstance avant de répliquer
"Malheureusement, rares sont les esclaves de qualités de nos jours. Et il nous incombe à nous, leurs maitres, de...sévir lorsque la situation l'exige." Déclara la jeune noble en arquant un sourcil lorsque son regard se posa sur Azura. "Néanmoins, votre sollicitude m'honore seigneur Caesennius."répliqua posément Freya après avoir entendu le Consul nommer le nouveau venu. Elle salua en inclinant la tête la jeune femme qui l'accompagnait et les invita à prendre place à leurs côtés si tel était le désir du Consul mais également des deux nouveaux venus bien entendu. Il fallait se montrer courtois. N'en déplaise au regard noir que pouvait lancer Ulter lorsque ce Vel proposa sans attendre de lui racheter Azura.

Elle pria tous les dieux qu'Ulter arrive à garder son calme. Comme elle aurait voulut le rassurer là, dans l'instant qu'il n'avait pas à s'inquiéter de cette affaire. Que jamais elle ne permettrait qu'on lui reprenne Azura. Nul doute que son cher et tendre devait avoir ses nerfs en une pelote sacrément emmêlée. En entendant la proposition du jeune noble, Azura se jeta presque à ses pieds en la suppliant. Son coeur se brisa une nouvelle fois en la voyant ainsi. Par tous les dieux, il fallait être de marbre pour ne rien ressentir. "Il suffit esclave! Cesse de te donner en spectacle et de me faire honte!" Essayant de garder son calme, Freya intima à son esclave de se taire d'un geste de la main. "Votre proposition est fort tentante seigneur Caesennius. Il est rare de rencontrer un inconnu prêt à vouloir soulager une délicate jeune femme d'un poids certain." Pendant un instant, la "délicate jeune fille" qu'elle était, plongea son regard dans celui du jeune noble. Malgré ses paroles saupoudrées de bienveillance, Freya trouvait la proposition de Vel suspecte.

Pourquoi donc voudrait-il racheter Azura et risquer de s'encombrer d'une piètre esclave tout en proposant de l'échanger contre une autre, visiblement bien mieux? Cependant, Freya devrait faire preuve de doigté. "Votre proposition pourrait effectivement m'intéresser cependant le moment n'est pas propice pour parler affaires. N'embêtons pas notre cher Consul avec ces verbiages et profitons des spectacles que nous offre l'Empereur. Je vous ferais part de ma décision en temps voulu. Qui sait, peut-être que cette bonne à rien se révèlera utile? Auquel cas, je serais heureuse de m'en séparer." Ainsi, Freya laissa planner l'éventualité de revendre Azura à Vel tout en restant maîtresse de la situation, montrant aux yeux de tous qu'elle n'avait que faire de cette sauvage. Bien évidemment, il était hors de question que la noble donne son amie à cet inconnu.

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